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«Cadre d’action de l’UE sur les plastiques biosourcés, biodégradables et compostables»

Journal officiel de l'Union européenne

(texte le 29.06.2023)


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions



1. Conclusions et recommandations

Le Comité économique et social européen (CESE):

1.1.

salue la communication relative au cadre stratégique de l’Union européenne sur les plastiques biosourcés, biodégradables et compostables, s’agissant d’un secteur qui lui ouvre des possibilités de se rapprocher de ses objectifs en matière de durabilité et de circularité. S’ils sont correctement réglementés, les bioplastiques peuvent servir d’instruments de développement «vert» en entraînant une baisse de la consommation d’énergies fossiles, une réduction de la pollution due aux plastiques et une progression de la collecte sélective des déchets;

1.2.

souligne que l’Europe, comme il convient de s’en féliciter, joue un rôle de pionnière dans l’élaboration de bioplastiques et de plastiques biodégradables et que, de 2007 à 2020, elle a financé plus de 130 projets de recherche, à hauteur d’un milliard d’euros (1). L’Union européenne est le deuxième producteur mondial de bioplastiques, et elle devrait renforcer sa position sur la scène internationale, en se concentrant sur les produits qui présentent la plus forte valeur ajoutée, c’est-à-dire ceux qui sont à la fois biosourcés et compostables, la production asiatique se limitant principalement aux produits compostables mais non renouvelables;

1.3.

estime que l’Union pourra se montrer encore plus compétitive à l’échelle mondiale, en opérant un maximum d’avancées environnementales, si le nouveau cadre réglementaire est en mesure de cibler les applications industrielles présentant la plus grande valeur ajoutée du point de vue de l’environnement et que l’ensemble des nouveaux produits mis sur le marché comportent une communication claire et précise, permettant aux consommateurs d’adopter une démarche volontariste dans la transition vers l’économie circulaire;

1.4.

encourage la Commission à tirer ses conclusions sur la base d’une analyse comparative des avantages des plastiques biosourcés, biodégradables et compostables par rapport à ceux d’origine fossile. Certaines recommandations non comparatives, péchant par excès de prudence, risquent de ne pas fournir d’orientations suffisantes à la recherche, à l’innovation et au lancement d’activités d’investissement, et, ainsi, de freiner les progrès et d’entamer l’avantage concurrentiel dont jouit l’Union européenne;

1.5.

recommande d’examiner systématiquement, en fonction des découvertes scientifiques les plus récentes, toutes les mesures qui ont une incidence, directe et indirecte, sur l’environnement législatif et normatif en la matière. Pareille démarche pourrait atténuer le flou en la matière et protéger les utilisateurs;

1.6.

demande que le système de la hiérarchisation des priorités en fonction d’une utilisation en cascade soit appliqué à l’évaluation des matériaux, des produits et des processus, y compris pour ce qui est des aspects liés à la circularité et à la durabilité. Cette recommandation vaut pour les matières premières, la biomasse et les chaînes alimentaires, ainsi que pour les cascades de recyclage. La mise en œuvre de la directive sur les énergies renouvelables (RED III) établira en outre l’ordre de priorité en vertu duquel la réutilisation ou le recyclage des matières, en l’occurrence renouvelables, prime sur la réutilisation à des fins énergétiques, ressortissant aux énergies renouvelables;

1.7.

est persuadé que l’analyse du cycle de vie constitue un excellent outil pour évaluer certains aspects liés à la durabilité des produits et contribue ainsi à orienter les activités de recherche, d’innovation et d’investissement, prévues ou en cours. Il s’impose toutefois de consentir, dans une mesure considérable, des efforts supplémentaires pour combler les lacunes inhérentes aux méthodes utilisées actuellement, le but étant de réduire les incertitudes découlant de la non-prise en compte de l’avantage que présente le carbone d’origine biologique (2) et des incidences sur le capital naturel;

1.8.

juge que la plupart des méthodes actuelles de comptabilisation des coûts et de fixation des prix ne parviennent pas à internaliser et reconnaître, pour ce qui est des inconvénients et avantages induits, l’incidence produite par les composants supplémentaires qui sont recyclés et réintroduits dans le cycle de production. Grâce à un régime de responsabilité élargie des producteurs (REP) qui repose sur l’analyse du cycle de vie et soit adapté aux besoins spécifiques, il sera possible de recalculer et corriger le handicap de compétitivité qui affecte les produits biopolymères du point de vue des tarifs;

1.9.

suggère qu’un éventail de domaines d’intervention bien ciblés, qui devraient relever des compétences d’une Union européenne «vectrice de valeur ajoutée»(3), pourra contribuer à détecter et éliminer les goulets d’étranglement qui freinent les progrès rapides qu’il est nécessaire d’accomplir. Pareille approche revêt une pertinence toute particulière en ce qui concerne les données, le suivi et les discussions, ainsi que l’aide apportée à la recherche et l’innovation;

1.10.

préconise que la Commission poursuive les examens cycliques des grandes évolutions qui s’opèrent dans l’écosystème des biopolymères. Les méthodes et outils de consultation publique qui sont intégrés dans les procédures constituent un bon moyen d’y associer toutes les parties prenantes, en veillant au premier chef que la société civile organisée participe à la démarche par le truchement des différentes associations représentatives;

1.11.

incite les États membres à imposer des pourcentages de teneur en matières plastiques biosourcées tant pour les plastiques biosourcés que pour ceux de type compostable. Il est proposé que tous les dispositifs publicitaires, concernant, par exemple, la promotion ou l’image de marque, obéissent à des normes et règles fixées de manière définitive. Pour ce qui est de déterminer la teneur certifiée en carbone d’origine biologique, la méthode à utiliser est celle du carbone 14. La méthode du bilan massique, quant à elle, peut être admise pour exprimer la teneur en biomasse d’un recyclage plus complexe, multiple ou intermédiaire, mais les consommateurs doivent en être informés;

1.12.

prend acte de la réglementation interdisant les plastiques à usage unique, mais préconise de préciser les définitions de son champ d’application et de sa formulation, car il a la conviction que cette réglementation ne devrait pas exclure un certain nombre de produits et applications qui, dans le domaine du plastique, sont destinés par nature à un usage unique, ne sont pas consignés et ne peuvent donc être réutilisés ou recyclés mécaniquement. Dans ces cas, l’utilisation de plastiques biosourcés ou de plastiques biodégradables et compostables est à privilégier;

1.13.

considère que le recyclage mécanique, en circuit court, est souvent bénéfique, en raison de sa simplicité relative, mais comporte des points faibles, notamment en ce qu’il aboutit à recycler de manière dévalorisante, du fait des mélanges, ou présente des carences concernant les limites d’épaisseur, les rendements qu’il produit ou ses besoins en énergie. Des comparaisons fouillées du point de vue de la durabilité pourraient aboutir à la conclusion qu’il est préférable d’utiliser des polymères biosourcés ou des filières de recyclage différentes, c’est-à-dire organiques ou chimiques. Dans ce cas, l’option la plus appropriée pourrait consister à utiliser des matières plastiques qui soient tout à la fois biosourcées et compostables. Des techniques de dissociation doivent encore être mises au point pour les feuilles minces;

1.14.

est d’avis que les plastiques biodégradables certifiés aux normes européennes offrent des possibilités d’atténuer la pollution plastique en réduisant l’accumulation de déchets constitués de microplastiques et nanoplastiques et, partant, les dommages que causent les types non biodégradables. À l’heure actuelle, les applications disponibles pour une biodégradation contrôlée dans des environnements naturels spécifiques de type ouvert sont fort peu nombreuses, quoique très importantes. Il convient de consentir des efforts supplémentaires pour élaborer des méthodes systémiques combinant les propriétés matérielles et les conditions afin de tirer parti des options de biodégradation dans les sols et d’autres environnements ouverts spécifiques;

1.15.

est convaincu que le compostage industriel et l’utilisation de plastiques compostables constituent un excellent moyen d’améliorer la collecte et l’utilisation des déchets alimentaires. Outre le retour du carbone dans le sol, ces techniques permettent d’éliminer et recycler conjointement les déchets alimentaires et les emballages, tout comme d’autres catégories d’objets compostables. Il convient d’encourager et d’aider les États membres à mettre en œuvre la collecte sélective obligatoire des déchets organiques à partir de 2024. Pour franchir cette étape, il importe de disposer de plastiques compostables, par exemple pour la fabrication de sacs et d’autres applications liées aux denrées alimentaires, ainsi que de mettre en place les infrastructures et l’organisation requises et de lancer les campagnes de sensibilisation nécessaires;

1.16.

demande que la gamme d’applications qu’offrent les plastiques compostables ne se limite pas à celles énumérées dans la proposition de la Commission relative aux emballages et aux déchets d’emballages. L’expérience et les bonnes pratiques montrent que les plastiques compostables peuvent jouer un rôle bénéfique dans bon nombre de domaines, principalement en ce qui concerne le contact avec les denrées alimentaires, les circuits fermés et les feuilles minces.


2. Contexte de l’avis, glossaire et état des lieux dans le secteur


2.1. Définitions des plastiques renouvelables

Le mot «bioplastiques» est un terme collectif générique qui ne devrait être utilisé ni dans le cadre de la commercialisation de plastiques ni dans celui de leurs applications, étant donné qu’il peut être employé à mauvais escient, induire en erreur ou susciter des associations négatives. Dans le cas présent, il fait référence aux «plastiques biosourcés, biodégradables et compostables».

Les plastiques biosourcés (plastiques à base de plantes) sont des plastiques fabriqués à partir de matières premières renouvelables et non fossiles (4). Ils peuvent être biodégradables ou non. Les plastiques biosourcés de substitution sont chimiquement identiques à leurs analogues d’origine fossile. Les plastiques «bioattribuables» peuvent être définis comme des plastiques dont la composition comporte un contenu biologique donné.

Les plastiques biodégradables sont des plastiques qui, à la fin de leur vie utile, subissent une décomposition par des micro-organismes, aboutissant à produire de l’eau, de la biomasse, des sels minéraux et du dioxyde de carbone (CO2), ou du méthane, en cas de digestion anaérobie. Ils peuvent être fabriqués à partir de matières premières tant biologiques que fossiles.

Les plastiques compostables constituent un sous-ensemble de la classe des plastiques biodégradables, dans lequel le processus de biodégradation a lieu dans des conditions contrôlées, grâce à l’utilisation de micro-organismes, afin produire de résidus organiques stabilisés, de l’eau, ainsi que du CO2, en présence d’oxygène, ou du méthane, en son absence, les deux gaz finaux pouvant être collectés. Le compostage normalisé et strictement contrôlé s’effectue dans des usines de compostage, à savoir des centres de recyclage organique, qui répondent aux exigences de la norme EN 13432 (5) et donnent par ailleurs la garantie que les additifs utilisés sont écologiques. Le compostage domestique n’est pas encadré par des conditions aussi strictes et ne peut donc pas fournir un produit final prédéterminé.

Les plastiques qui sont tout à la fois biosourcés et biodégradables, y compris dans leurs versions compostables, offrent naturellement la combinaison la plus avantageuse, comme dans le cas de l’acide polylactique (APL), qui est largement utilisé.


2.2. Le secteur des matières plastiques


La production de plastiques et bioplastiques à l’échelle mondiale

Données de 2021-2022 — Production mondiale de plastiques et bioplastiques (6)


Source: European Bioplastics, Faits et chiffres (https://www.european-bioplastics.org/market/).

Les bioplastiques représentent actuellement environ 1 % de la production totale de plastiques à l’échelle mondiale.

D’ici à 2027, leur tonnage produit devrait toutefois passer de 1,8 à 6,2 millions de tonnes.


2.2.1. Les bioplastiques dans le monde


L’Asie, dont la Chine en particulier, constitue le principal pôle de production de bioplastiques (41,4 % en 2022), suivie par l’Union européenne (26,5 %) et les États-Unis (18,9 %).

D’ici à 2027, la part du continent asiatique devrait passer à 63 %, tandis qu’en l’absence de mesures de soutien, il est prévu que celle de l’Union diminue de manière significative.


2.2.2. La demande européenne de bioplastiques


Dans l’Union européenne, la demande de bioplastiques est passée de 210 000 tonnes en 2019 à quelque 320 000 tonnes en 2021 (7). Son taux de croissance annuel a excédé 23 %. La demande européenne intervient pour environ 18 % dans la production mondiale de bioplastiques. L’Europe joue un rôle de premier plan en ce qui concerne la balance du commerce extérieur et l’innovation technique.

Il est essentiel de mieux sensibiliser les consommateurs à faire la distinction entre plastiques d’origine fossile et utilisation optimale des bioplastiques.


2.3. Les enjeux environnementaux des plastiques


2.3.1. Incidence sur le climat


En comparaison, notamment, des chaînes de valeur de l’énergie, des produits chimiques et d’autres matériaux, celle des plastiques contribue dans une mesure limitée aux émissions de gaz à effet de serre (GES). Il a été estimé qu’en 2018, les émissions totales de gaz à effet de serre dues à la chaîne de valeur des plastiques dans l’Union européenne atteignaient 208 millions de tonnes d’équivalent dioxyde de carbone (équivalent CO2). Pour leur majeure partie, en l’occurrence 63 %, elles sont imputables à la production de polymères plastiques. La transformation de ces polymères en produits intervient pour 22 % des émissions, et le traitement des déchets plastiques en fin de vie en dégage les 15 % restants, principalement du fait de leur incinération (8).


2.3.2. Incidence sur le capital naturel


Indépendamment de leur incidence sur le climat, les plastiques présentent également un taux de recyclage qui reste trop faible. Il en résulte qu’ils produisent des répercussions sur l’environnement et le capital naturel mondial, ou empreinte écologique, parce qu’ils entament un stock limité de ressources naturelles et infligent des dommages aux écosystèmes mondiaux, tels que les sols, les terres, l’air, l’eau, les organismes vivants et, en bout de chaîne, la santé et le bien-être humains. L’accumulation de microplastiques dans l’eau douce et l’eau de mer constitue un problème spécifique.


2.3.3. Efforts visant à atténuer le problème


La chaîne de valeur des bioplastiques est susceptible de réduire les émissions de dioxyde de carbone, grâce à celui qui est capturé ou est d’origine biologique, pour autant que ces matières soient nettement plus utilisées et que les déchets de plastiques biosourcés soient recyclés plutôt qu’incinérés. Fabriquer des plastiques grâce à la biomasse ou veiller à ce que des produits en plastique puissent se biodégrader dans certains environnements offre un certain nombre d’avantages par rapport aux plastiques conventionnels, mais encore faut-il qu’ils soient reconnus et pris en compte. Dans le rapport ETC/WMGE 2021/3 d’Eionet, il a été calculé qu’un scénario où tous les plastiques d’origine fossile seraient remplacés par des plastiques biosourcés dans l’Union européenne aboutirait à des émissions annuelles totales de gaz à effet de serre de 146 millions de tonnes d’équivalent CO2 pour ces matières plastiques biosourcées, soit 30 % de moins que les 208 millions de tonnes d’équivalent CO2 provenant de la chaîne de valeur de celles d’origine fossile (9).


3. Observations générales


3.1. Les bioplastiques ont pour caractéristique commune de présenter de grandes potentialités pour améliorer et préserver un cycle du carbone durable et équilibré. En conséquence, ils contribuent à une incidence nette sur le climat et le capital naturel qui soit nulle. Les deux principales catégories de plastiques concernées doivent toutefois être traitées séparément. Les plastiques biosourcés, à base végétale, sont des outils qui permettent la transition d’une économie où les plastiques sont d’origine fossile à celle où ils proviendront de la biomasse. Parallèlement, les plastiques biodégradables et compostables présentent des avantages exceptionnels pour la gestion des produits en fin de vie et pour la réalisation des objectifs du pacte vert, s’agissant, par exemple, de réduire le gaspillage alimentaire ou d’assurer la durabilité de la production et de la consommation.

Il est judicieux d’utiliser des plastiques à la fois biosourcés et compostables afin de réduire le bilan net en émissions de gaz à effet de serre en en soustrayant la quantité de CO2 absorbée de l’environnement.


3.2. La communication de la Commission européenne fournit une analyse approfondie et étendue du secteur des plastiques biosourcés, biodégradables et compostables, en passant en revue les données disponibles. Ses conclusions et recommandations se révèlent par trop prudentes sur plusieurs points et risquent de décourager l’innovation et les investissements dans certains domaines essentiels. L’analyse devrait s’effectuer sur un mode comparatif, en examinant côte à côte les plastiques biosourcés, biodégradables et compostables et leurs équivalents actuels d’origine fossile, même si le remplacement systématique, «un pour un», des plastiques par des bioplastiques ne constitue pas un scénario viable dans tous les cas de figure.


3.3. Au sein de la société, l’image et l’acceptation globales des matériaux et produits durables et de leur utilisation se situent à des niveaux fort élevés, atteignant généralement des taux de 80 à 90 % dans les enquêtes d’opinion. Parmi les consommateurs interrogés, 25 % seraient prêts à payer un prix supérieur de 20 % à celui des produits équivalents fabriqués à partir de matières plastiques d’origine fossile et 4 % accepteraient de débourser 50 % de plus pour des produits biopolymères durables.


3.4. La conception et la mise en œuvre d’un cadre stratégique réaliste nécessitent:

d’établir des définitions et classifications claires et univoques des différents types de biopolymères, de leurs caractéristiques et des domaines où leur utilisation est optimale,

de veiller à ce que tout un chacun sache que l’adjectif «biosourcé» se rapporte uniquement à l’origine des matières premières utilisées pour fabriquer ces matériaux, tandis que les qualificatifs «biodégradables» et «recyclables» renvoient à une propriété systémique, qui dépend de leur matière et de l’environnement ou des conditions de leur fin de vie fonctionnelle,

de réaliser un examen et une harmonisation systématiques de l’environnement législatif régissant la conception, la fabrication, l’utilisation et la remise en circulation des produits en plastique, soit leur cycle de vie complet,

de procéder à une nouvelle harmonisation de l’ensemble des normes et des prescriptions d’étiquetage connexes, en tenant compte des résultats de recherches récentes, des évolutions techniques et des innovations,

de fournir aux consommateurs des informations scientifiquement prouvées sur ces matériaux, de mettre en place des infrastructures efficaces pour qu’ils puissent prendre part au processus de réalisation des objectifs convenus d’un commun accord en matière de durabilité, ainsi que de continuer à étudier les incidences des bioplastiques sur la santé et l’environnement.


3.5. Le cadre doit intégralement obéir à un système de hiérarchisation des priorités en fonction d’une utilisation en cascade, qui couvre également l’utilisation des plastiques à la source et en amont d’elle. Il doit couvrir la totalité de la chaîne de valeur et respecter les principes prescrivant de préserver, réutiliser, recycler et valoriser, afin de conserver les composants dans la filière. Dans la mesure du possible, le stock, le flux et le cycle du carbone doivent être contrôlés dans leur ensemble: cet impératif couvre celui qui est concentré dans les matières premières, telles que le charbon, le pétrole ou le gaz, celui qui est produit, traité, capturé, sous forme de CO2, celui qui est collecté, en tant que déchet, et recyclé, ainsi que celui qui est dispersé, tel que présent dans les produits usagés, le sol et l’air. En matière de recyclage, les options optimisées du point de vue de la durabilité, englobent des circuits de type soit court, s’agissant du recyclage mécanique, soit intermédiaire, se rapportant au recyclage physique, chimique ou combinant ces deux formes, soit complet, couvrant toute la boucle, de type biochimique, en fonction de la manière dont les différentes substances peuvent être réintégrées dans la filière.


3.6. Les exigences susmentionnées induisent toute une série de nouveaux enjeux en matière d’ingénierie de l’écoconception. Outre les tâches traditionnelles liées à la fonctionnalité, à la commodité et à l’esthétique des produits, les ingénieurs du domaine de l’écoconception doivent désormais prendre en compte l’approvisionnement en matières premières, la durée de vie, les prévisions de fin de vie, la circularité et la durabilité optimisée.


3.7. Un approvisionnement en matières premières durables mérite une attention particulière si l’on considère que sur le marché des plastiques, ceux qui sont biosourcés détiennent une part de 1 % tout en ne mobilisant que 0,02 % des terres arables. Si, selon dans une hypothèse théorique, mais irréaliste, ils se substituaient à 100 % à ceux d’origine fossile, leur production ne nécessiterait que 4 à 5 % de ces terres. Les cultures, destinées à la production de sucre, d’amidon et d’huile, représentent actuellement une part de deux tiers dans les sources de matières premières nécessaires à la fabrication de ces matériaux, tandis que les produits non comestibles, comme le bois ou l’huile de ricin, en forment le tiers restant. Malgré cette faible consommation de terres, l’objectif sera d’opérer une descente dans l’utilisation en cascade des denrées alimentaires et de la biomasse, c’est-à-dire de réorienter l’approvisionnement en matières premières pour la production de ces plastiques pour que des cultures ou des denrées alimentaires, il migre vers des sous-produits, comme la paille ou les déchets de bois, et les déchets recyclables, tels que les déchets organiques de lignocellulose, d’hydrocarbures et d’hydrates de carbone, qui seraient utilisés à cette fin plutôt que d’être destinés à une valorisation énergétique. Cette démarche s’applique également aux initiatives relatives à de nouvelles matières premières telles que les déchets d’algues.


3.8. Les technologies de fabrication, pour la plupart, sont déjà en place et celles destinées aux plastiques d’origine fossile peuvent être appliquées à la transformation de ces matières premières. En ce qui concerne la chaîne de circularité, d’autres étapes doivent toutefois être ajoutées aux deux extrémités du processus linéaire, à savoir la production de matières premières et le bioraffinage, d’une part, et la collecte et le traitement des déchets, suivis d’un recyclage ou d’une valorisation, d’autre part, ces mesures étant nécessaires pour les flux de matières plus diffus. Au besoin et lorsqu’il est possible de le faire, il convient de recourir à des processus centralisés pour la capture du CO2.


3.9. La recherche sur les matériaux et l’ingénierie afférente devraient s’attacher à élargir le spectre des utilisations des nouveaux biopolymères ou des mélanges, grâce à de combinaisons inédites de propriétés physiques, chimiques, fonctionnelles ou portant sur la dégradabilité, tant en ce qui concerne les caractéristiques des matières que les conditions.


3.10. Les aspects liés au travail n’ont pas encore fait l’objet d’une analyse approfondie. Selon les estimations, 175 000 à 215 000emplois supplémentaires devraient être créés d’ici à 2030 (note de bas de page no 16). Qui dit nouvelles technologies dit demande de nouvelles compétences, en particulier en ce qui concerne le traitement des matières premières, le recyclage et l’ingénierie de l’écoconception. Ces besoins devront être pris en compte grâce à des plans de développement et d’investissement, ainsi que des programmes de formation, d’éducation, de reconversion et de perfectionnement professionnels. Dans ces métiers, la satisfaction professionnelle et le prestige augmentent, mais il convient d’accorder la même attention à l’élaboration de conditions de travail décentes.


3.11. Les modèles actuellement utilisés pour la comptabilisation des coûts et la fixation des prix recourent pour la plupart à l’approche traditionnelle ou linéaire «du berceau à la porte». Dans cette comparaison, les biopolymères sont désavantagés en raison des niveaux de prix élevés de leurs matériaux de base, d’un accès plus dispersé aux matières premières, de productions en séries de moindre volume et de la courbe d’apprentissage. Ce handicap pourrait toutefois disparaître totalement dans un paradigme de recyclage permanent ou «du berceau au berceau» qui internalise les coûts de la remise en circulation durable. Des méthodes modulaires de responsabilité élargie des producteurs correctement appliquées seraient susceptibles de compenser ce désavantage.


3.12. Les méthodes et calculs d’analyse du cycle de vie sont utilisés afin d’évaluer l’empreinte environnementale des biens et des matériaux usagés. Des efforts considérables ont été déployés pour définir et quantifier cette incidence, qui est exprimée en émissions nettes de gaz à effet de serre mesurées en équivalent CO2. Il est nécessaire de procéder à davantage d’expériences, de recherches et de modélisations pour affiner les méthodes actuelles de calcul de l’empreinte environnementale de produit (EEP), car elles s’avèrent inopérantes pour établir les avantages que présente le carbone d’origine biologique ou pour quantifier les effets découlant du changement d’affectation des terres et les incidences, difficiles à estimer, produites sur le capital naturel. Disposer d’une analyse du cycle de vie qui soit réaliste et reconnue constitue un préalable obligé pour la mise en place d’un système crédible et modulaire de responsabilité élargie des producteurs. Des investigations et des prévisions qui pourraient s’appuyer sur une telle analyse réduiraient les risques, en orientant dès l’amont les décisions en matière de recherche et d’innovation et d’investissement.


3.13. Les pratiques et les législations des États membres varient considérablement. Pour être «vectrice de valeur ajoutée»(10), l’Union européenne devrait donc soutenir en priorité des domaines tels que la collecte de données et la transparence, la détection et la diffusion de bonnes pratiques, le suivi des progrès scientifiques, économiques, financiers et sociaux, ainsi que la mise en évidence des goulets d’étranglement et l’aide visant à les éliminer ou les dénouer, afin de préserver sa compétitivité dans ce secteur.


4. Observations particulières


4.1. Introduction


4.1.1. Dans un certain nombre de cas, le recyclage mécanique n’est pas réalisable, car il se peut que les emballages soient contaminés par des denrées alimentaires ou qu’il ne soit pas possible ou pratique de recycler mécaniquement ceux qui sont de petite taille ou de faible épaisseur. Dans ces cas de figure, les plastiques compostables constituent une bonne solution car ils permettent l’élimination et le recyclage conjoints des déchets alimentaires et des emballages.


4.2. Plastiques biosourcés


4.2.1. Le cadre d’action devrait préciser que les plastiques biosourcés sont tenus de comporter une quantité minimale de matières biosourcées et recyclées, à commencer dans le cas de la proposition de la Commission européenne relative aux emballages et aux déchets d’emballages, du 30 novembre 2022. Ce contenu en plastique biosourcé pourrait remplacer ou compléter la quantité minimale de matières recyclées. La sécurité alimentaire exige l’utilisation de matériaux vierges ou recyclés chimiquement pour les produits en contact avec les denrées alimentaires, comme les couverts, les gobelets, les plateaux ou les films d’emballage. Les bouteilles et plateaux en polytéréphtalate d’éthylène (PET) sont les seuls objets qui peuvent être recyclés mécaniquement et retraités en vue d’un contact direct avec des denrées alimentaires.


4.2.2. Il existe d’ores et déjà des dispositifs de certification des contenus biosourcés, tels que le système «OK biobased» de TÜV Austria OK (11) et celui de DIN CERTCO (12). Sont également disponibles des normes européennes et internationales spécifiques (13), y compris des approches fondées sur le bilan massique certifiées par des tiers. En outre, certains États membres ont défini des niveaux obligatoires de concentration en matières tant recyclées que biosourcées. Dans le cadre d’une certification, la teneur en carbone d’origine biologique devrait être définie à l’aide de la méthode radiochimique du carbone 14. Toutefois, pour les produits recyclés à plusieurs reprises et non homogènes et les plastiques contenant du plastique biosourcé, la méthode de la concentration massique pourrait également s’avérer recevable.


4.2.3. Certaines méthodes de chaîne de contrôle ouvrent la voie à l’utilisation de matières premières biosourcées dans des produits intermédiaires ou pour lesquels la complexité des chaînes de valeur ou l’échelle atteinte ne permettent pas encore d’opérer de distinctions (14).


4.2.4. À titre de méthode la plus harmonisée disponible, le cadre d’action mentionne celle de l’«analyse du cycle de vie des plastiques» (15) du Centre commun de recherche, qui s’appuie elle-même sur celle de l’empreinte environnementale de produit (EEP) de l’Union européenne. Toutefois, cette méthode EEP se révèle insuffisante lorsqu’il s’agit d’évaluer correctement les changements d’affectation des sols, ainsi que le carbone d’origine biologique, et contredit même, sur ce point, certaines normes communément admises (16) prenant en considération l’absorption initiale de carbone d’origine biologique dans les produits et plastiques biosourcés.


4.3. Plastiques biodégradables et compostables


Les propriétés de biodégradabilité et de compostabilité ne constituent pas des facteurs négatifs qui entraîneraient une augmentation des déchets sauvages. Il n’existe aucune preuve, étude ou démonstration confirmant l’hypothèse voulant que la biodégradabilité pourrait avoir une incidence négative du point de vue des déchets abandonnés. Ce problème peut être réglé au moyen d’un système d’étiquetage, tel que celui déjà mis en place en Italie. Aucun matériau ne peut finir en déchet sauvage. Ils doivent tous être collectés, triés et recyclés.


4.3.1. Plastiques biodégradables


La biodégradabilité des plastiques dans l’environnement ouvert ne constitue pas un outil de gestion des déchets. Au contraire, et conformément à la directive 94/62/CE du Parlement européen et du Conseil (17) et à la norme EN 13432, les plastiques compostables doivent être recyclés de manière organique, avec les déchets alimentaires ou les effluents d’élevage et le lisier, dans des installations de compostage, afin de produire du compost organique susceptible d’être utilisé comme engrais organique pour traiter et amender les sols. L’objectif est de recourir à ces matériaux lorsqu’ils présentent des avantages avérés du point de vue de la durabilité, par exemple dans le domaine des denrées alimentaires. Cet emploi de plastiques compostables peut contribuer tout à la fois à augmenter les taux de collecte des déchets organiques et à réduire la contamination des déchets organiques par les plastiques ordinaires.


4.3.1.1. Des recherches intensives supplémentaires devraient être menées sur l’optimisation systémique des matériaux et les conditions de biodégradation contrôlée dans des environnements naturels spécifiques, de type ouvert. Les enduits hydrodégradables ou les emballages polymères, dégradables dans les sols, contenant des engrais à libération lente ou contrôlée en fournissent de bons exemples. Toutefois, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour développer la dégradation, car elle peut fortement contribuer à prévenir et atténuer la pollution par accumulation de microplastiques et nanoplastiques.


4.3.1.2. Comme le reconnaît la communication de la Commission européenne, les plastiques biodégradables jouent un rôle important dans l’agriculture. Dans ce secteur, ils constituent une solution de substitution avantageuse, car ils se dégradent dans le sol sans générer de microplastiques. En outre, ils évitent les pertes de sol qui se produiraient si l’on utilisait en lieu et place des films de paillage ultrafins en plastique ordinaire, d’une épaisseur inférieure à 25 micromètres.


4.3.2. Plastiques compostables de manière industrielle


4.3.2.1. Le CESE souligne le rôle essentiel que jouent les plastiques compostables dans la plupart des emballages et des autres éléments qui entrent en contact avec des denrées alimentaires, notamment, pour ne citer que les quelques exemples mentionnés par la Commission, les autocollants des fruits et légumes, les sachets de thé, les dosettes de café et les sacs en plastique très légers. Par conséquent, il convient d’encourager l’utilisation d’autres emballages et éléments compostables de grande diffusion, comme les couverts, les gobelets, les plateaux ou les films d’emballage, y compris dans le cas de manifestations, d’utilisations et de sites en circuit fermé, plutôt que de les interdire au titre de l’article 22, combiné avec l’annexe V, de la proposition relative aux emballages et aux déchets d’emballages. Cette situation n’est pas en cohérence avec l’obligation faite, à partir du 31 décembre 2023, de collecter séparément les biodéchets ou de les recycler à la source dans tous les pays de l’Union européenne (18), les plastiques compostables étant appelés à jouer un rôle essentiel pour augmenter le taux de récupération des biodéchets et réduire la contamination du compost par des plastiques non biodégradables.

Étant donné que certains plastiques compostables et biosourcés se trouvent déjà sur le marché, l’option la plus appropriée semble être d’exiger que les plastiques compostables contiennent une teneur minimale en plastiques biosourcés, comme le prévoient déjà certaines législations nationales, par exemple en Italie et en France.


4.3.2.2. La révision de la directive sur les engrais a mis en évidence un déséquilibre manifeste dans les schémas européens de fertilisation, qui présentent une surconsommation, en moyenne, de nutriments synthétiques à base d’azote, de phosphore et de potassium, qui est susceptible de provoquer une eutrophisation des eaux, tandis qu’en parallèle, un déficit en apport d’engrais organiques, comme le fumier, le compost issu de déchets ou les boues, peut entraîner une baisse de la teneur en carbone des sols.


4.3.2.3. La communication de la Commission européenne considère que la question de la contamination croisée constitue un argument pour limiter l’utilisation des plastiques compostables. Toutefois, ce phénomène concerne non seulement les plastiques compostables, mais aussi d’autres matériaux, comme les métaux présents dans les flux de plastiques et les plastiques non compostables mêlés aux biodéchets. Les flux de plastiques font également l’objet d’une contamination croisée, de sorte qu’il est souhaitable de séparer les différents polymères avant leur introduction dans la plupart des processus de recyclage, si l’on veut éviter que les produits obtenus soient de moindre valeur. Dans la pratique, la contamination croisée des flux de plastiques par les bioplastiques n’est pas prouvée: les données italiennes montrent que la présence de plastiques compostables dans ces flux est inférieure à 1 %. La raison en est que certains produits ne peuvent être fabriqués qu’en plastique compostable, comme dans le cas des sacs, couverts ou assiettes en plastique à usage unique, et qu’il existe un système d’étiquetage clair pour les plastiques tant compostables qu’ordinaires, grâce auquel le consommateur peut les distinguer et les mettre au rebut dans la filière de recyclage appropriée, en plaçant les plastiques compostables dans les poubelles prévues pour les biodéchets et non dans celles recueillant les plastiques non compostables. Par conséquent, les pays qui ont mis en place des systèmes adéquats de gestion des déchets pour les plastiques compostables évitent de provoquer des contaminations croisées et ne sèment pas la confusion dans l’esprit du consommateur (19). Ces États, ainsi que leurs cadres législatifs, leurs systèmes de gestion des déchets et leurs dispositifs d’étiquetage pourraient offrir des exemples de bonnes pratiques en ce qui concerne les bioplastiques.

Bien qu’il soit envisageable de procéder à une mise à jour de la norme EN 13432, la communication de la Commission européenne n’a pas su reconnaître que les usines de compostage qui recourent aux meilleures pratiques et technologies disponibles pour les processus en la matière, en particulier pour ce qui est de leur durée, sont en mesure de traiter et de biodégrader complètement les plastiques compostables et les déchets alimentaires, comme le montrent les entretiens menés par Biorepack dans certaines de ces installations (20). Ni les bioplastiques ni la norme EN 13432 ne peuvent être incriminés si certaines usines de compostage, surtout dans les États membres de l’Union européenne dont les systèmes de gestion des déchets alimentaires sont moins efficaces, ne respectent pas les processus et les délais appropriés en la matière. Les équipements concernés ont tout simplement besoin d’une mise à niveau.


Bruxelles, le 27 avril 2023.

Le président du Comité économique et social européen Oliver RÖPKE


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